Pia Huber

Transparence et opacité

Exposition Le plasticien Jean Mauboulès et la peintre
Pia Huber, un doublé contrasté à la Galerie Numaga
à Colombier

Les expositions doubles sont assez fréquentes dans les galeries, établissant un dialogue entre des oeuvres dissemblables. C’est le cas de la présentation, à la Galerie Numaga à Colombier, des sculptures, collages, reliefs et dessins de Jean Mauboulès et des peintures de Pia Huber. S’ils ont peu de choses en commun, ce straveaux se répondent pourtant, dans l’harmonie et la simplicité. D’une part, donc, un plasticien rodé, qui maîtrise aussi bien les lois de la physique que les matériaux choisis, le verre, l’acier, moulé en barres, le fer, affiné en tiges. De l’autre une artiste plus jeune, tournée vers la nature, dont elle capte des moments, des morceaux – reflets multidirectionnels des roseaux dans l’eau d’un étang, pousses et touffes qui s’amenuisent à mesure qu’elles s’éloignent, dans un champ, simples sillons dont la courbe épouse le terrain bosselé.
La maîtrise des moyens, par Jean Mauboulès, la propreté des pièces, leur caractère épuré produisent une oeuvre presque transparente, qui se joue sur les jeux d’équilibres, l’ellipse, l’arc. Combinée à des formes rectilignes, la courbe modifie leur économie, d’autant plus qu’à l’opposition entre la droite et la courbe s’ajoute le contraste entre l’épaisseur et la finesse, l’intensité d’un noir, par exemple, et son estompage via l’interposition de feuilles de papier-calque.

Singulière poésie
Les peintures, sur toile ou sur papier, de Pia Huber, née en 1967 à Bienne, sont d’un abord âpre, peu séducteur. Passant de l’une à l’autre, on se laisse prendre aux tonalités tamisées, des beiges, des tons bruns et vert d’eau, à la voix sourde qui émane des compositions. A partir de photographies ou de croquis captés lors de promenades, Pia Huber cherche des structures cachées et trouve, dans le rendu d’une terre imbibée d’eau et encore parsemée de taches de neige, dans l’enchevêtrement de tiges et de branchages, dans la tombée de feuilles fanées, une suingulière poésie. L’opacité de ces plages colorées semble se déchirer par endroits pour donner jour sur une clarté qui, pour lointaine qu’elle apparaisse, enveloppe, tel un drap, l’ensemble du motif et de la vision en général. Laurence Chauvy

Le Temps, 25 mars 2011