Sous l’eau qui dort
Dialogues des champs labourés, vibrant sous un pinceau délicat,
ondulation de paysages plus ou moins réels, paysages du
dehors allant vers l’en dedans de l’être.
Terre, plis, profondeur de la peinture, neige de silence sur une
terre matricielle.
Le monde pictural de Pia Huber, jeune peintre zurichoise exposée
à la galerie Numaga, à Colombier, a le mérite de dire beaucoup
sans en avoir l’air. Ses paysages viennent aux yeux avec
la délicatesse d’un ciel d’hiver doux et silencieux, puis, quelques
instants plus tard, ceux-là mêmes nous chuchotent des
milliers d’histoires, de sensations. On comprend dans le calme
apparent de cette oeuvre ce que la peinture garde en elle de
miraculeux, d’indicible, de sacré.
Dans l’autre espace de la galerie, on découvre des blancs de
peinture, des blancs de vies, des oeuvres dégageant une douceur
imposante, comme une contradiction, un silence de bouddha,
une attente souriante.
Ces peintures, travaillées comme des sculptures de peintures,
sagement accrochées au mur, regardent le spectateur et le
laissent libre de les découvrir, de les dévoiler ou de passer simplement
à côté. C’est un travail de matières (bois, cire, toiles,
métal) et de rythmes silencieux. Il y a des surfaces grises aussi
ou vertes, il y a le bois qui reste là, visible sous une couche
de matière fine, et puis la toile qui ne disparaît jamais comme
pour montrer qu’elle est matière, avant tout, elle aussi. Puis
il y a des lignes à nouveau, fentes dans le bois, reliefs légers,
subtils.
Le travail d’Antoine Martin est à n’en pas douter un monde de
contemplation, un monde de retenue, un monde en attente.
C’est une respiration qui se suspend un instant, le temps d’une
peinture, et qui prend corps aisi. Orélie Fuchs
Exposition à la galerie Numaga à Colombier, 2007
L‘Express de Neuchâtel, 24. Februar 2007